Géorgie : violences lors de manifestations contre une loi sur les financements étrangers des ONG
Des manifestations émaillées de heurts ont éclaté en Géorgie contre un projet de loi visant à enregistrer comme «agents de l'étranger» les ONG financées à plus de 20% par des fonds étrangers. Le parti au pouvoir dénonce l'action de «radicaux».
La police géorgienne a fait usage de gaz lacrymogène le soir du 8 mars pour tenter de disperser des manifestants réunis devant le Parlement dans le centre de Tbilissi, après avoir leur avoir ordonné de quitter les lieux, rapporte l'AFP. Quelques instants plus tôt, les forces de l'ordre avaient utilisé des canons à eau pour tenter de faire partir les protestataires, rassemblés pour dénoncer un projet de loi portant sur les financements étrangers des ONG. La même agence de presse avait constaté, plus tôt, la présence de dizaines de milliers de manifestants dans la capitale géorgienne.
Dans le viseur des contestataires : le projet de loi «Sur la transparence de l'influence étrangère». Ce texte, adopté en première lecture, prévoit que les organisations financées à plus de 20% par des fonds provenant d'autres pays s'enregistrent comme «agents de l'étranger» – un texte que ses détracteurs comparent à une loi russe de 2012.
Un nouveau Maïdan ?
La veille, des heurts ont eu lieu entre les protestataires, dont certains arboraient des drapeaux de l'Union européenne, et les forces de l'ordre. Selon le ministère géorgien de l'Intérieur, des manifestants ont tenté de mener une «attaque organisée» contre le Parlement. Le même ministère a affirmé qu'au moins 66 personnes avaient été interpellées à cette occasion, et qu'une cinquantaine de policiers et civils avaient été blessés lors des échauffourées. Le parti d'opposition Girch a lui déclaré que son chef avait été blessé à la mâchoire puis arrêté et placé en détention.
L'Ukraine, au final, a perdu 20% de son territoire
Le président du parti au pouvoir, Rêve géorgien, Irakli Kobakhidze a dénoncé l'action de «radicaux» et fait un parallèle entre ces protestations et le coup d'Etat soutenu par l'Occident de Maïdan en Ukraine, en 2014. «L'Ukraine, au final, a perdu 20% de son territoire» après ces événements, a-t-il affirmé.
Parallèle opportun ou pas, des membres du camp occidental affichent en tout cas leur opposition au projet de loi : le chef de la diplomatie de l'Union européenne Josep Borrel a ainsi condamné le 8 mars le texte, le jugeant «incompatible» avec les valeurs de l'UE et l'objectif de rejoindre le bloc européen. L'ambassade des Etats-Unis en Géorgie a également dénoncé le projet de loi, estimant que la poursuite de ce type de texte «nuira[it] aux relations de la Géorgie avec ses partenaires stratégiques». En outre, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a déclaré vouloir «le succès démocratique» pour les manifestants en Géorgie.
La présidente Salomé Zourabichvili, ancienne diplomate franco-géorgienne et réputée pro-UE, a déclaré qu'elle opposerait son veto à cette loi, mais le parti majoritaire au Parlement est en capacité de le surmonter. Selon son chef, Irakli Kobakhidze, la deuxième et la troisième lecture du texte ne pourraient toutefois avoir lieu qu'en juin, après la revue du projet de loi par la Commission de Venise, un organe consultatif du Conseil de l'Europe, note l'AFP. La Géorgie a déposé une candidature pour entrer dans l'UE en 2022 mais n'a pas obtenu le statut de candidat comme l'Ukraine, car Bruxelles demande des réformes en échange.