Les prévisions de production d'hydrocarbure en 2030, incompatibles avec les objectifs de la COP21 ?
D’après une étude menée par le Programme des Nations unies pour l’environnement, la production de charbon, pétrole et gaz en 2030 dépassera de 50 % les objectifs des accords de Paris pour limiter le réchauffement climatique à deux degrés Celsius.
Une étude de plus – cette fois menée par le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) – souligne le danger imminent qu’encoure la planète si les citoyens du monde ne changent immédiatement leurs manières de vivre, essentiellement dans le domaine de la production et consommation d’énergie, des industries et de l’agriculture.
Dans ce rapport publié le 20 novembre, le PNUE s’intéresse particulièrement aux divergences entre les prévisions de production des pays producteurs de combustibles fossiles (pétrole, gaz et charbon) en 2030, et le niveau de production mondiale qu'il faudrait atteindre pour limiter le réchauffement climatique à 1,5 ou 2 C°, tel qu'inscrit dans l'accord de Paris sur le climat.
Or, cette étude révèle l'antinomie totale entre ces prévisions de production d’énergies fossiles et les objectifs fixés par l’accord de Paris en 2015. Plus précisément, elles sont en excès de 50% pour atteindre un niveau compatible avec le scénario des 2 C°, et de 120% pour le scénario à 1,5 C°. Dans le détails, l'écart le plus important constaté est celui du charbon : les estimations prévues pour 2030 dépassent de 150% le niveau convenable avec le scénario des 2 C°, et de...280% pour l’objectif de 1,5.
Michael Lazarus, l’un des principaux auteur de l’étude souligne «l’ampleur de la déconnexion entre les objectifs de l’accord de Paris, les plans nationaux (de réduction d’émissions) et les politiques de production de charbon, de pétrole et de gaz».
Bilan inquiétant et perspectives mitigées
L’inertie est telle depuis les premiers rapports sur le climat – dont le rapport Meadows de 1972 – que les énergies fossiles représentent toujours 80% de l’énergie primaire mondiale, et les principaux acteurs du domaine continuent à y investir abondement. Les prévisions de production de pétrole et de gaz devraient par exemple augmenter respectivement de 43% et de 47% d’ici 2040. Pire encore, les hydrocarbures contribuent à 75% des émissions mondiales de gaz à effet de serre, qui ne cessent d’augmenter, note Le Figaro.
Le non-dit politique majeur aujourd'hui, c'est que la lutte contre le réchauffement climatique n'est pas compatible avec la croissance économique
«Malgré plus de deux décennies de politique climatique, les niveaux de production d’énergies fossiles n’ont jamais été aussi élevées», pointe Mans Nilsson, directeur du Stockholm environment institute, également auteur de l’étude. Et bien que chaque pays participant se soit engagé lors de la COP21 à réduire ses émissions de gaz à effet de serre, «leurs promesses cumulées conduiraient la planète vers une hausse de plus de 3°C», remarque Ouest-France.
Selon Jean-Marc Jancovici, ingénieur et consultant sur les questions d'énergie et de climat, enseignant à l'école des Mines ParisTech et président du think tank The Shift Project, pour lutter contre le réchauffement climatique, il est nécessaire diminuer notre consommation d'énergie. «Globalement, il faut baisser de 4% par an nos émissions de CO2». «Ni les énergies renouvelables, ni le nucléaire ne permettront de compenser cette baisse pour conserver le confort moderne. Il faut bien comprendre que de lutter contre le changement climatique, c'est de se mettre au régime. [...] Le non-dit politique majeur aujourd'hui, c'est que cela n'est pas compatible avec la croissance économique. Ce n'est même pas compatible avec le maintien de la production économique actuelle. Donc, cela veut dire perte de pouvoir d'achat, pour être très clair, pour tout le monde, pas juste pour les riches.»
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