L’Autriche se dit «extrêmement critique» de l’accord entre l’UE et la Turquie sur les migrants
Évoquant la situation de la liberté d’expression en Turquie, la ministre autrichienne de l’Intérieur n’a pas caché son opposition à l’accord controversé, toujours en phase de négociation entre Bruxelles et Ankara.
«Je me demande sérieusement si nous nous prenons, nous et nos valeurs, au sérieux ou si nous sommes en train de les jeter par-dessus bord», a déclaré Johanna Mikl-Leitner à la radio publique jeudi, ajoutant qu’elle était «extrêmement critique» envers les propositions faites par la Turquie à l'Union européenne.
La ministre a fait part de son étonnement quant au fait qu’Ankara se retrouve à la table des négociations après l’assaut des forces truques sur les quartiers généraux du quotidien Zaman.
Censuré en #Turquie, le journal #Zaman continue de défier Recep Tayyip Erdogan en français https://t.co/a9aZ1LyXecpic.twitter.com/dsAd9NtnNw
— RT France (@RTenfrancais) 7 mars 2016
«Je pense qu’il est discutable que la Turquie prenne le contrôle d’un journal critique envers le gouvernement et se tourne ensuite vers ici [à Bruxelles] trois jours après et mette une liste de souhaits sur la table», a déclaré la ministre.
L’Autriche n’a pas été la seule à faire part de critiques envers l’accord entre l’Union européenne et la Turquie. Des politiciens allemands, ainsi que plusieurs groupes de défense des droits de l’homme, se sont opposés à celui-ci.
Dans un entretien au quotidien régional Rheinische Post, le ministre de l’Intérieur bavarois Joachim Herrmann a affirmé jeudi que «nous ne devrions pas faire trop de concessions envers la Turquie».
Critiquant la perspective de voir les citoyens turcs voyager en Europe sans visa, il a rappelé la décision de l’Allemagne, en 2009, d’abolir les demandes de visa pour les ressortissants des Balkans, ce qui avait à l'époque fait «exploser» le nombre de demandes d’asile, selon lui.
Lundi, les dirigeants de l’Union européenne et de la Turquie se sont mis d’accord sur une stratégie pour faire face à la crise migratoire qui traverse le Vieux continent. Ankara a promis de prendre en charge un réfugié syrien de Grèce pour chaque réfugié syrien que l’UE acceptera des camps en Turquie. Toutefois, la mesure ne serait pas rétroactive et n’inclurait donc pas «les réfugiés déjà [présents] sur les îles grecques».
En échange de sa proposition, Ankara a demandé un financement de Bruxelles à hauteur de six milliards d’euros, une zone sans visa pour que ses citoyens puissent librement accéder aux pays de l’espace Schengen, et a réitéré sa volonté de rejoindre l’Union. L’accord devrait être finalisé à l’occasion du prochain sommet européen, qui se tiendra les 17 et 18 mars à Bruxelles.