Les renseignements européens dans le flou face à l'administration Trump

Les Européens peinent à discerner l’orientation et les priorités des renseignements américains qui semblent viser prioritairement le trafic de drogue, venant remplacer la Russie et la Chine à la tête des préoccupations américaines, depuis l’accession au pouvoir de Donald Trump.
Le retour de Donald Trump à la Maison Blanche n’a pas fait que secouer le monde économique. Les milieux du renseignement européens semblent aussi se débattre pour tenter de comprendre les signaux envoyés par Washington quant aux orientations américaines de renseignement. Un article du site Le Monde paru ce 22 avril pointe le manque de visibilité sur les orientations des États-Unis depuis le retour de Trump au pouvoir. Une situation jugée « très inconfortable » par l'establishment européen. Pour les services de renseignements, la difficulté réside dans le fait d’adopter une nouvelle stratégie apte à compenser l’apport américain en matière de renseignement.
Le Monde cite plusieurs sources diplomatiques, militaires et sécuritaires qui ont fait part du « choc » causé notamment par la suspension du soutien à l’Ukraine en matière de renseignement par le Pentagone, trois jours durant, entre les 5 et 8 mars derniers, « au point de susciter des réflexions inédites entre alliés » affirme la même source.
Nouvelles priorités américaines
Si les cercles européens de réflexion en matière de renseignement s’accordent sur le fait de maintenir la coopération avec les Américains, l’idée de mettre en place une « appréciation autonome » revient aussi en force à la lumière des événements récents et du manque de visibilité sur le cap adopté par les États-Unis.
Pour ne rien arranger, la publication faite le 25 mars dernier de l’évaluation annuelle de la menace 2025 (Annual Threat Assessment), un rapport de doctrine non classifié, issu du bureau du directeur du renseignement national, a placé la lutte contre le trafic de drogue à la tête des priorités du renseignement américain. Pour l’Europe, cette nouvelle priorité américaine augmente les risques d’un « nouvel isolationnisme américain ».
En ce qui concerne la Russie, l’évaluation annuelle de la menace 2025 semble adopter les arguments russes concernant les risques liés à la guerre en Ukraine dans la mesure où la poursuite du conflit induit des « risques stratégiques pour les États-Unis d’une escalade involontaire vers une guerre à grande échelle, de l’utilisation potentielle d’armes nucléaires ».
Développer une nouvelle architecture de renseignement
Face à cette situation, les services de renseignement européens disposent de la possibilité de développer une architecture de renseignement sur le modèle des « Five Eyes », qui met à profit les capacités d’interception des États-Unis, du Canada, de l’Australie, du Royaume-Uni et de la Nouvelle-Zélande, explique Le Monde. Or, à l’heure actuelle, les réflexions sont confinées au niveau d’une densification des opérations en coopération entre les pays les plus volontaires. Pour aller encore plus loin dans cette piste, il est nécessaire d’accélérer le développement de la surveillance par satellite et s’assurer la coopération des ténors de la technologie ; mais pour l’heure, les ressources financières nécessaires à l’application de cette idée ne sont pas à la hauteur.