Une pétition d'élus LR refusant les alliances avec LREM récolte plus de 5 000 signatures
Intitulée «NON aux alliances avec LREM !» et adressée au président des Républicains, la pétition a recueilli 5 000 signatures en trois semaines. A l'origine de l'initiative avec d'autres élus, Thomas Zlowodzki répond aux questions de RT France.
Le 27 mai, trois élus locaux membres des Républicains ont mis en ligne une pétition sous forme de lettre ouverte au président du parti Christian Jacob intitulée «NON aux alliances avec la LREM !». Trois semaines plus tard, celle-ci franchissait la barre des 5 000 signatures.
Des valeurs qui «ne sont pas solubles dans le macronisme» ?
Les signataires se déclarent «attachés aux valeurs authentiques de la droite» et affirment ne pas se reconnaître «dans la ligne confuse actuelle de [leur] parti».
«Nous réaffirmons avec force que nos valeurs de droite, valeurs pour lesquelles nous sommes engagés en politique, ne sont pas solubles dans le macronisme. Elles en sont même l’exact opposé», affirment-ils, en précisant que leurs «valeurs de droite ne sont compatibles avec celles de la majorité gouvernementale ni sur le plan national ni sur le plan local».
A l'initiative de cette démarche se trouvent trois élus LR, fondateurs du collectif «Droite pour la France» : Maxime Meunier, Président de la fédération LR de la Sarthe et conseiller municipal à Ecommoy, Romain Bonnet, ancien président de la fédération LR de la Vienne et conseiller municipal de Loudun et Thomas Zlowodzki, conseiller national LR, et conseiller municipal et communautaire de Sainte-Geneviève-des-Bois.
Ce dernier a accepté de répondre aux questions de RT France afin d'expliquer la démarche et de préciser les objectifs visés par cette pétition.
RT France : Qu'est-ce qui a motivé la rédaction de cette pétition ? Pourquoi maintenant ?
Thomas Zlowodzki : La propension d'une partie de la droite à se tourner vers Emmanuel Macron est une tendance longue, qui trouve son origine dès les primaires de 2016. Mais on a franchi un nouveau palier le 4 mai lorsque la commission d'investiture des Républicains a décidé de conserver son soutien à Renaud Muselier, qui avait organisé une alliance avec LREM dès le premier tout en région PACA. Une démarche qui n'avait pas suscité de réaction de la part de Christian Jacob ni d'une grande partie des cadres nationaux LR. Par ailleurs, de nombreux candidats encartés LREM sont présents sur des listes LR présentées aux élections départementales, sans même parler des candidats «Macron-compatibles» – ceux issus de l'UDI par exemple. Nous avons donc considéré qu'il fallait mettre un holà à cette «banalisation» de LREM au sein de la droite.
Cette situation symbolise-t-elle une fracture entre les cadres LR et les militants ?
Oui, tout à fait ! Les militants adhèrent aux Républicains pour des questions de ligne au niveau national, sur des sujets tels que la fiscalité, les dépenses publiques, la famille etc. Jamais un adhérent n'a pris sa carte pour défendre un conseiller départemental ! Or, les élus locaux cherchent avant tout à préserver leur mandat, et sont donc prêt à réaliser des alliances avec LREM. Avec cette logique, les LR ne se mettent pas du tout en position de gagner en 2022 !
Considérez-vous Emmanuel Macron comme un homme de gauche ? Qu'est-ce qui différencie la politique qu'il mène à la tête de l'Etat de celle de Nicolas Sarkozy ?
Oui, Emmanuel Macron est un homme de gauche ! Quasiment rien ne le distingue de François Hollande. Sur la politique familiale par exemple, Emmanuel Macron n'est pas revenu sur la fin de l'universalité des allocations familiales et n'a pas augmenté le quotient familial, ce qui a entraîné une baisse des naissances. Sur la sécurité, malgré ses déclarations de début de mandat, Macron n’aura construit presqu’aucune place de prison, tout comme François Hollande qui avait enterré les programmes lancés par Nicolas Sarkozy. Emmanuel Macron a par ailleurs pris des mesures contre les classes moyennes telles que l'augmentation des taxes sur le gazole ou les limitations de vitesse à 80km/h. Il n'a pas été plus à gauche que François Hollande, mais il a bloqué le curseur à son niveau.
Pour vous, que signifie être de droite ?
Etre de droite c'est défendre des valeurs telles que la méritocratie, la famille, mais aussi la prise de risque dans l'entreprenariat ou la lutte contre l'immigration et la défense de l'identité française. Des éléments qui se retrouvaient dans le programme commun RPR-UDF de 1990 ! Un certain nombres de nos cadres ne voient plus la différence entre LR et LREM car ils ont oublié ce que signifie être de droite. Heureusement, d'autres tels que David Lisnard s'en souviennent encore. A l'étranger, je considère qu'un homme comme le Premier ministre hongrois Viktor Orban est réellement de droite, compte tenu de ses positions sur les questions touchant à l'identité, à la fiscalité, à la famille.
Vous qui êtes élu d'Ile-de-France, avez-vous apporté votre soutien à Valérie Pécresse ?
Face à l’union de la gauche et de l’extrême gauche au second tour, on ne peut que soutenir Valérie Pécresse en Ile-de-France. On peut toutefois légitimement s’interroger sur sa nature de femme de droite et regretter qu’elle ait mis toute la frange conservatrice de sa liste de 2015 à la retraite. Elle vise une majorité Modem-Libres ! et quelques élus LR Macron-compatibles. Valérie Pécresse a quitté Les Républicains car elle trouvait que la ligne incarnée par Laurent Wauquiez était trop à droite, pour reprendre un an après le même discours... C'est problématique ! Et ce d’autant que ce problème de crédibilité et de confiance est capital pour LR : les électeurs se demandent si les élus LR une fois arrivés au pouvoir feront vraiment ce qu'ils ont promis.
Christian Jacob ou d'autres cadres nationaux de LR ont-ils réagi à votre pétition ?
Je n'ai pour l'heure reçu aucune réaction de Christian Jacob. Des cadres avaient réagi au moment de la publication de la pétition, pour nous dire qu'ils auraient aimé que leurs noms soient cités dans le texte.
Quel est l'objectif pratique de votre pétition ?
La France est sociologiquement de droite, et il n'y a plus qu'un parti qui peut incarner cette ligne : les Républicains. Nous avons donc toute la place pour être un grand parti, mais pour des raisons tactiques de court terme nous nous sommes mis en grande difficulté. L'objectif est donc de recenser et de fédérer les gens authentiquement de droite chez LR, afin de pouvoir peser sur la ligne du parti.
Dans cette perspective, quelles sont les prochaines échéances ?
Nous souhaitons une primaire pour 2022 afin que Xavier Bertrand ne nous soit pas imposé comme candidat représentant les Républicains, un parti dont il n'est même plus membre. Ce sera l'occasion pour les militants de trancher en choisissant une ligne claire pour le parti.
Sans cela, les Républicains risquent-ils de devenir l'appendice local de LREM, le parti présidentiel manquant d'ancrage territorial ?
Avec les alliances avec LREM, on donne l'impression que LR a comme objectif d'apporter des cadres locaux au parti présidentiel sous le manteau. Certains regrettent de ne pas avoir fait comme Bruno Le Maire et Gérald Darmanin en rejoignant Emmanuel Macron dès 2017. S'il parvient à détruire les Républicains, ce dernier bénéficiera d'un très large socle central, entre le RN et LFI.
Que pensez-vous des résultats du premier tour des élections régionales et départementales ? Confortent-ils votre analyse ?
Les résultats du premier tour confortent absolument notre analyse. La droite n’est jamais aussi forte que lorsqu’elle est claire sur sa ligne. Laurent Wauquiez a ainsi recueilli le meilleur score en France pour la droite. Surtout, les scores des candidats LREM, qui ne dépassent nulle part 15%, témoignent qu’il était vain de vouloir fusionner avec eux avant le premier tour ou d’envoyer des signaux pour laisser envisager une alliance de second tour. Nous avons réitéré le 21 juin notre demande d’exclure toute alliance avec LREM au second tour. A ce stade, il semble que les candidats aux régionales aient entendu le message.
Par ailleurs, il faut garder une grande humilité par rapport à l’interprétation des résultats, en raison de l’abstention massive. Si la droite a réalisé de bons scores, c’est avant tout dans les régions où nous avions des sortants. Les élections présidentielles et législatives se joueront sur la clarté de la ligne politique et la crédibilité des candidats à l’honorer une fois élu. A notre sens, seule une primaire peut permettre à la droite de se relancer pleinement. La grande faillite des sondages lors de ces élections régionales et départementales montre bien que le processus initié par Christian Jacob à coup de sondages ne tient pas la route. C’est aux militants, aux adhérents, aux sympathisants de droite de désigner eux-mêmes leur candidat. Nous prendrons toute notre part dans ce nouveau bras de fer avec la direction des Républicains qui va s’ouvrir le 28 juin prochain, au lendemain du second tour.
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