Roumanie : la Cour constitutionnelle annule l’élection présidentielle sur fond d'accusations d'ingérence étrangère

Roumanie : la Cour constitutionnelle annule l’élection présidentielle sur fond d'accusations d'ingérence étrangère Source: AP
Des personnes agitent des drapeaux roumains et de l'Union européenne lors d'un rassemblement pro-européen avant le second tour des élections présidentielles du 8 décembre à Bucarest, en Roumanie, jeudi 5 décembre 2024.
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La Cour constitutionnelle roumaine a annulé, ce 6 décembre, le premier tour de l'élection présidentielle, sans donner de justification. La Cour avait, le 2 décembre, validé le résultat du premier tour après un recomptage des voix qu'elle avait ordonné.

Ce 6 décembre, la Cour constitutionnelle roumaine a annulé les résultats du premier tour de l'élection présidentielle, initialement remporté par Calin Georgescu, un candidat indépendant qualifié dans les médias d'«ultra-nationaliste» et de «pro-russe».

«Le processus électoral [...] reprendra dans son intégralité, le gouvernement fixera une nouvelle date pour l'élection [...], ainsi qu'un nouveau calendrier pour accomplir les tâches nécessaires» a déclaré la Cour dans son communiqué, sans donner de raison à sa décision.

Selon la chaine Digi24, celle-ci s’appuierait sur des rapports déclassifiés du Conseil suprême de défense nationale (CSAT) qui mettraient en avant des irrégularités électorales majeures. Des documents qui évoquent notamment des campagnes d’influence en ligne, et qui «suggéraient fortement une campagne soutenue par la Russie pour corrompre le scrutin» relate Politico.

Selon RIA Novosti, les services de renseignement roumains auraient mis en évidence «une campagne en faveur de Georgescu», orchestrée via TikTok et soutenue par des comptes Telegram. Politico rapporte pour sa part que 25 000 comptes pro-Georgescu sur TikTok «sont entrés en action seulement deux semaines avant le scrutin».

Les formations pro-européennes saluent la décision des juges

Pointée du doigt, la Russie a déjà fermement nié toute implication. Dmitri Peskov, porte-parole du Kremlin, a déclaré aux journalistes le 29 novembre que «nous n'avons pas l'habitude d'interférer dans les élections dans d'autres pays, en particulier en Roumanie, et nous n'avons pas l'intention de le faire maintenant». «Ces accusations ne sont qu’une tendance occidentale visant à diaboliser Moscou», a-t-il ajouté.

Lors du scrutin du 24 novembre, Calin Georgescu a obtenu 22,94% des voix, devançant Elena Lasconi, une candidate pro-occidentale, qui a recueilli 19,18% des suffrages. Un résultat qui a suscité des inquiétudes parmi les partisans des alliances, euro-atlantiques, de la Roumanie. Georgescu, critique de l'UE et de l’OTAN, a promis de mettre fin à l’assistance militaire à l’Ukraine s’il était élu.

Pour Elena Lasconi, qualifiée pour le second tour, l’annulation des élections constitue une atteinte à la démocratie. «Aujourd'hui, l'État roumain a piétiné la démocratie», a-t-elle déclaré dans une vidéo publiée sur ses réseaux sociaux ce 6 décembre.

De son côté, Marcel Ciolacu, le Premier ministre roumain et candidat du Parti social-démocrate (PSD), a soutenu la décision de la Cour via une publication sur Facebook. «Les preuves d’ingérence étrangère et de manipulation sont trop graves pour être ignorées», a-t-il affirmé sur sa page Facebook.

Même ton du côté du Parti socialiste européen (PSE), le deuxième en taille au Parlement. «Le tribunal s'est prononcé en faveur d'un processus démocratique, qui doit être protégé des influences extérieures au pays» stipule un communiqué du parti publié, également, sur Facebook.

Premier tour : le recomptage des voix avait été validé par la Cour

Selon le quotidien économique russe Kommersant, les élections pourraient être reprogrammées dès ce 15 décembre, mais le risque de contestations sociales reste élevé. «C'est une honte ! Le coup d'État bat son plein», a dénoncé George Simion, leader du parti conservateur Alliance pour l'unité des Roumains (AUR), appelant à une résistance démocratique contre la décision de la Cour roumaine.

La Cour constitutionnelle «a détruit la démocratie en Roumanie !» a fustigé Ludovic Orban, président de Forza Dreptei (FD), sur sa page Facebook. «9 personnes occupant temporairement les postes de juges de la Cour Constitutionnelle ont annulé de manière totalement abusive l'acte de volonté des citoyens roumains, qui ont exprimé leurs choix à travers le vote accordé aux candidats au 1er tour de l'élection présidentielle» a-t-il ajouté.

Celui-ci a par ailleurs souligné que la Cour avait validé, le 2 décembre, un recomptage des voix qu'elle avait ordonné le 28 novembre. Un recomptage qui, selon les juges, «n’a pas révélé de fraudes susceptibles d’altérer le résultat des élections».

La Roumanie, membre stratégique de l’OTAN avec ses 19 millions d’habitants, se retrouve dans une impasse politique. Le mandat de l’actuel président Klaus Iohannis s’achève le 21 décembre, mais l’annulation des élections retarde l’arrivée d’un successeur, et pourrait plonger le pays dans une crise institutionnelle. Les critiques estiment que cette décision pourrait désormais éroder la confiance des citoyens dans le processus électoral.

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