L'enthousiasme de la Bourse brésilienne pour Bolsonaro retombe en attendant le programme
A Sao Paulo, la bourse a salué par anticipation l'élection de Jair Bolsonaro, mais immédiatement reculé, dans l'attente de précisions sur son programme économique. Des privatisations et une réforme des retraites sont attendues.
L’euphorie de la Bourse de Sao Paulo qui, vers la fin de la semaine dernière, le 26 octobre, avait précédé l’annonce des résultats de l’élection présidentielle est retombée le 29 en fin de séance. L'indice Ibovespa des 50 principales sociétés brésiliennes a clôturé en baisse (-2,4%) sous la barre de 84 000 points, après s’être approché d’un record historique vers 86 000 le 26 octobre. Quant au réal, la monnaie brésilienne, qui avait atteint 3,60 réals pour un dollar, un plus haut depuis avril, il s'est à nouveau déprécié, se négociant à 3,71 réals pour un dollar.
Le mouvement d'euphorie s'est déjà produit quand les sondages ont montré la consolidation [l'avance] de Bolsonaro
Outre les explications techniques, comme les prises de bénéfices, l'une des raisons de ce repli est, selon Rafael Corte, du cabinet brésilien de conseil Tendencias cité par l’AFP que «le mouvement d'euphorie s'est déjà produit quand les sondages ont montré la consolidation [l'avance] de Bolsonaro». Au cours du mois d’octobre, la Bourse avait en effet déjà gagné 10%.
Les marchés attendent désormais de connaître plus précisément le programme économique du gouvernement, même si dès l’annonce des premiers résultats, le 28 octobre au soir, l'ultra-libéral Paulo Guedes, probable futur ministre de l'Economie, a donné des gages aux milieux d'affaires.
Il a notamment promis d’accélérer le rythme des privatisations au motif de réduire la dette publique – 77% du PIB – et s’est engagé à mener, dès janvier 2019, une réforme du régime des retraites. Elle pourrait permettre à l’Etat de réduire ses dépenses et de rediriger les flux financiers des cotisations vers la bourse et les entreprises. Pendant la campagne, l'équipe de Jair Bolsonaro avait évoqué la mise en place d'un système de retraite par capitalisation proche de celui qu’envisage Emmanuel Macron pour la France, mais elle s'est gardée de donner des détails qui auraient pu lui coûter des voix.
Incertitudes sur la réforme des retraites
«La réforme fiscale, la réduction du nombre de ministères sont importants mais, actuellement, la grande question est celle de la réforme des retraites et celle de savoir si le Congrès sera disposé à l'approuver», explique Sergio Vale, analyste du cabinet brésilien de consultants MB Associados cité par l’AFP.
Car, malgré sa progression spectaculaire, le Parti social libéral (PSL), formation que Jair Bolsonaro a rejointe au début de l’année, n’a obtenu que 52 sièges dans une assemblée extrêmement morcelée de 513 députés répartis entre 30 partis politiques. Désormais deuxième groupe derrière le Parti des travailleurs de l’ex-président Lula, emprisonné pour corruption (56 députés), le PSL de Jair Bolsonaro devra former une coalition. Cette épreuve devrait toutefois être facilitée par les 30 ans de carrière politique du président élu, au sein de six différents partis centristes ou de droite.
Entre joie et désespoir, le #Brésil 🇧🇷 se réveille coupé en deux après l'élection de #Bolsonaro (IMAGES)
— RT France (@RTenfrancais) 29 octobre 2018
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Même s'il a surtout axé sa campagne sur la lutte contre la corruption et l'insécurité, le nouveau président du Brésil sera, dès son investiture en janvier prochain, ramené à la réalité d'une situation économique difficile. La 8e économie mondiale et première d'Amérique latine souffre, entre autres maux, d’un coût de financement public élevé. Elle subit un spread (écart de taux) de 728 points par rapport au T-Note du Trésor étasunien et de plus de 1000 par rapport au Bund allemand pour ses obligations à 10 ans. En comparaison les écarts ne sont, respectivement que de 31 et 305 points pour les bons du Trésor d'Italie, dont la dette dépasse pourtant 131% du PIB.
Le Brésil compte en outre 23 millions de pauvres et près de 13 millions de chômeurs, soit un taux qui dépasse encore 10%, malgré un recul notable depuis le début de 2017.
Jean-François Guélain
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