RDC : le M23 et ses alliés rwandais ont pénétré à Goma, les civils «pris au piège»
Le Conseil de sécurité de l’ONU tire la sonnette d’alarme face à la percée des rebelles du M23 dans l’est de la RDC, alors que le groupe armé fait irruption à Goma, capitale du Nord-Kivu, bloquant les voies d’accès à la métropole où des centaines de milliers de civils se retrouvent désormais «pris au piège».
À l’est de la République démocratique du Congo (RDC), les rebelles du M23, soutenus par les forces armées rwandaises, ont occupé ce 27 janvier plusieurs positions dans la ville de Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu, après avoir pénétré la veille dans le quartier de Munigi, dans la banlieue nord de cette métropole qui compte plus de deux millions d’habitants, dont au moins 500 000 déplacés. Cette incursion a provoqué des déplacements de population massifs ainsi que le blocage de plusieurs routes et la fermeture de l’aéroport de la ville, rapportent les médias locaux.
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— Stanis Bujakera Tshiamala (@StanysBujakera) January 27, 2025
Des tirs nourris ont été entendus dans le centre-ville ce 27 janvier au matin. Parallèlement, une évasion massive a eu lieu dans la prison centrale, qui abritait quelque 3 000 détenus. La structure a été incendiée, causant des pertes humaines et semant davantage de confusion dans une ville déjà à bout de souffle. Alors que la situation sur place est marquée par des affrontements intenses, des déplacements massifs de populations et un désordre grandissant, le gouvernement de Kinshasa a déclaré vouloir «éviter le carnage» à Goma.
#RDC : tirs à Goma, le M23 et les FARDC toujours présents, scènes de pillages, évasions signalées, et des tirs entendus jusque près de Gisenyi pic.twitter.com/DWAEKOj4HM
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Depuis le début de l’année, le M23 a lancé des opérations de grande envergure dans la région du Nord-Kivu, avec l’appui des forces armées du Rwanda. Cette offensive a permis aux rebelles, munis d'artillerie lourde et de systèmes de brouillage du GPS, d’étendre de manière significative leur territoire par la prise de plusieurs villes en l’espace de quelques semaines. Le M23 a notamment ouvert un nouveau front dans la province du Sud-Kivu, prenant notamment le contrôle cette semaine de Minova, une ville située à un carrefour stratégique le long de la route vers Goma.
#RDC#M23: Les éléments AFC/M23 à #Gomapic.twitter.com/aoQT8CeSMG
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«Nous sommes pris au piège», s'alarme la Monusco
Le Conseil de sécurité de l’ONU, réuni d’urgence le 26 janvier face à la percée du groupe armé a dénoncé le «mépris éhonté» de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la RDC, appelant au retrait des «forces extérieures». De son côté, le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a explicitement exigé le retrait des troupes rwandaises, mettant en garde contre une escalade qui pourrait embraser toute la région.
#RDC#AFC_M23: « La priorité était de regarder notamment avec les responsables militaires comment on préserve les vies humaines. Il y avait la détermination des autres et nos forces sont très déterminées et au milieu de ça, il y a une population, et le devoir du Président de la… pic.twitter.com/Oz2A3b5xQk
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«Nous sommes pris au piège», s’est alarmée de son côté l’envoyée spéciale de l’ONU en RDC et cheffe de la Mission des Nations unies dans ce pays (Monusco), Bintou Keita, devant le Conseil de sécurité. La Monusco, qui appuie les forces armées congolaises (FARDC), avait annoncé la veille la «relocalisation temporaire» de son personnel «non essentiel» stationné à Goma. Selon l’ONU, trois casques bleus de la Monusco ont été tués et 11 autres ont été blessés au cours des dernières 48 heures.
«La réunion d’aujourd’hui a lieu dans un contexte de détérioration majeure de la situation à l’est de la RDC», a déclaré pour sa part le chef des opérations de paix de l’ONU, Jean-Pierre Lacroix. «La situation se détériore rapidement et si les hostilités se propagent à Goma, un centre urbain densément peuplé, l’impact sur les civils pourrait être dévastateur», a par ailleurs affirmé la Coordonnatrice adjointe des secours d’urgence de l’ONU, Joyce Msuya, rappelant que plus de 21 millions de personnes avaient déjà besoin d’aide dans toute la RDC, l'un des pays comprenant le plus de déplacés au monde.
Le Kenya annonce un sommet extraordinaire avec Tshisekedi et Kagame
Le 25 janvier, la RDC a annoncé la rupture de ses relations diplomatiques avec le Rwanda, qu’elle accuse de soutenir la percée militaire des rebelles du M23 dans l’est du pays. Dans la foulée, le Rwanda a annoncé de son côté avoir «évacué» son dernier diplomate en poste à Kinshasa.
Face à cette escalade, le président kényan William Ruto a annoncé dans un communiqué réunir «dans les prochaines 48 heures» un sommet extraordinaire de la Communauté des États d'Afrique de l'Est (EAC) en présence des présidents de la RDC Félix Tshisekedi et du Rwanda Paul Kagame. Ce dernier, accusé de soutenir logistiquement et militairement le M23, avait refusé de participer à une réunion tripartite le 15 décembre dernier en Angola, censée établir une feuille de route vers la paix.
Devant le Conseil de sécurité, la cheffe de la Monusco, Bintou Keita a appelé les deux pays à mettre fin à «la rhétorique hostile» et aux «accusations mutuelles» pour laisser la place à des échanges constructifs. Le chef des opérations de paix Jean-Pierre Lacroix a en outre encouragé la RDC et le Rwanda à reprendre les négociations dans le cadre du processus de Luanda, dont il a rappelé les progrès significatifs réalisés au cours des derniers mois.
Alors que l’armée de la RDC (FARDC) tente de contenir les rebelles, les efforts diplomatiques, tels que le processus de Luanda, peinent à produire des résultats concrets face à l'absence de coopération du Rwanda. La RDC est confrontée depuis plusieurs années à une guerre meurtrière provoquée par la rébellion du M23, actif au Nord-Kivu, dans l’est du pays. Le groupe armé a été créé en 2012 par des officiers entrés en rébellion contre le gouvernement central.